À la demande de la commission des finances du Sénat, la Cour des comptes a engagé une réflexion sur des scénarios de financement des collectivités territoriales. Cette enquête intervient dans un contexte où la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales et la baisse des impôts de production ont profondément modifié le panier de recettes de tous les niveaux de collectivités, avec notamment une part croissante des impôts nationaux partagés avec l’État.
Alors qu’une nouvelle loi de programmation des finances publiques devra tracer une trajectoire des finances publiques incluant les finances locales à partir de 2023, une réflexion sur les évolutions possibles des modalités de financement des collectivités territoriales - régions, départements, communes et leurs groupements - apparaît nécessaire.
Le rapport de la Cour souligne la sédimentation historique de ces recettes et fait le constat, partagé avec de nombreux acteurs, d’un système complexe et à bout de souffle.
Après avoir présenté les scénarios d’évolution du financement des collectivités locales, il identifie les conditions d’une réforme impliquant une gouvernance renouvelée et un nouveau pacte de confiance entre l’État et les collectivités locales.
Un système de financement jugé à bout de souffle
Bien que leur situation financière soit favorable, avec un excédent de 4,7 Md€ fin 2021 contrastant avec les autres administrations publiques, le système de financement des collectivités locales est fortement critiqué pour son manque de lisibilité et de prévisibilité. Des ressources issues d’une sédimentation historique rendent aujourd’hui ce financement peu compréhensible pour les responsables locaux et les contribuables, avec des inégalités qui se creusent entre certains territoires.
Les principes qui devraient fonder le système de financement nécessitent une clarification. C’est notamment le cas de l’autonomie financière : le respect de ce principe repose sur une part minimale de ressources propres par niveau de collectivités.
L’autonomie financière, telle que mesurée par les ratios définis en 2004, progresse mais ne rend pas compte de la perception des élus locaux d’une perte de maîtrise de leurs ressources, en raison de la part croissante de la fiscalité nationale au sein de leurs ressources propres.
Par ailleurs, la péréquation souffre d’un manque d’objectifs clairement définis et reste trop peu développée au sein de chaque niveau de collectivités.
Enfin, les modalités de compensation des transferts de compétences ont conduit à rigidifier et émietter les transferts de fiscalité, au risque d’altérer la lisibilité d’ensemble de la fiscalité nationale partagée.
Des scénarios de réforme
La Cour a analysé trois options contrastées (dites « polaires »), consistant à pousser au maximum chacun des trois pôles de ressources : les ressources locales (fiscalité locale et redevances) représentent aujourd’hui la moitié des recettes des collectivités avec une part nettement plus importante pour le bloc communal (66% des recettes) que pour les départements (34%) et les régions.
Cette option de renforcement des ressources locales répondrait bien au critère de territorialisation, mais exigerait une péréquation horizontale plus importante entre collectivités.
S’agissant de la fiscalité nationale partagée, elle représente aujourd’hui environ 21% des recettes des collectivités, avec trois principaux impôts - la taxe sur la valeur ajoutée (TVA, pour 37,4 Md€), la taxe intérieure de consommation des produits énergétiques (TICPE, pour 11 Md€) et la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA, pour 8,2 Md€). Cette option répondrait bien aux critères d’équilibre et de solidarité, en revanche le critère de territorialisation implique une attention particulière à la définition concertée des règles et indicateurs de répartition pour tenir compte des caractéristiques socio-économiques des territoires. Enfin, les dotations et subventions représentent aujourd’hui 26% des ressources locales.
L’option d’un renforcement des dotations permettrait une sécurisation des recettes à un niveau adapté aux dépenses, mais ferait dépendre les collectivités territoriales des transferts financiers de l’État. Compte tenu des limites des options polaires, une réforme du financement des collectivités locales devrait viser à combiner les différentes ressources en conciliant les objectifs d’autonomie et de solidarité.
La Cour a ainsi élaboré un scénario possible de réforme qui recentrerait la fiscalité locale sur le bloc communal pour plus d’autonomie et de responsabilité, mettrait en place un système plus solidaire de financement des départements pour leur permettre de faire face à leurs dépenses sociales et renforcerait le financement des régions par la fiscalité nationale économique.
Les conditions d’une réforme
Aucune réforme profonde du système de financement des collectivités locales ne sera possible sans un climat de confiance avec l’État et une concertation fondée sur un partage et une appropriation plus forte des données. Cet impératif implique de mettre en place des instances adaptées, en créant une autorité indépendante, chargée d’organiser ce dialogue ou en réformant l’actuel Comité des finances locales. Ce dialogue plus équilibré exige des outils partagés et des données de qualité, facilement accessibles sur les recettes et les dépenses.
La Cour estime que deux impératifs devraient guider toute évolution du financement des collectivités locales : la simplification et l’équilibre financier.
Elle formule des recommandations pour accroître la lisibilité et la résilience du système de financement, clarifier les responsabilités sur les impôts locaux, simplifier le partage des impôts nationaux en tenant compte des réalités socio-économiques pour leur répartition entre collectivités.
COUR DES COMPTES >> Rapport du 12.10.2022
Alors qu’une nouvelle loi de programmation des finances publiques devra tracer une trajectoire des finances publiques incluant les finances locales à partir de 2023, une réflexion sur les évolutions possibles des modalités de financement des collectivités territoriales - régions, départements, communes et leurs groupements - apparaît nécessaire.
Le rapport de la Cour souligne la sédimentation historique de ces recettes et fait le constat, partagé avec de nombreux acteurs, d’un système complexe et à bout de souffle.
Après avoir présenté les scénarios d’évolution du financement des collectivités locales, il identifie les conditions d’une réforme impliquant une gouvernance renouvelée et un nouveau pacte de confiance entre l’État et les collectivités locales.
Un système de financement jugé à bout de souffle
Bien que leur situation financière soit favorable, avec un excédent de 4,7 Md€ fin 2021 contrastant avec les autres administrations publiques, le système de financement des collectivités locales est fortement critiqué pour son manque de lisibilité et de prévisibilité. Des ressources issues d’une sédimentation historique rendent aujourd’hui ce financement peu compréhensible pour les responsables locaux et les contribuables, avec des inégalités qui se creusent entre certains territoires.
Les principes qui devraient fonder le système de financement nécessitent une clarification. C’est notamment le cas de l’autonomie financière : le respect de ce principe repose sur une part minimale de ressources propres par niveau de collectivités.
L’autonomie financière, telle que mesurée par les ratios définis en 2004, progresse mais ne rend pas compte de la perception des élus locaux d’une perte de maîtrise de leurs ressources, en raison de la part croissante de la fiscalité nationale au sein de leurs ressources propres.
Par ailleurs, la péréquation souffre d’un manque d’objectifs clairement définis et reste trop peu développée au sein de chaque niveau de collectivités.
Enfin, les modalités de compensation des transferts de compétences ont conduit à rigidifier et émietter les transferts de fiscalité, au risque d’altérer la lisibilité d’ensemble de la fiscalité nationale partagée.
Des scénarios de réforme
La Cour a analysé trois options contrastées (dites « polaires »), consistant à pousser au maximum chacun des trois pôles de ressources : les ressources locales (fiscalité locale et redevances) représentent aujourd’hui la moitié des recettes des collectivités avec une part nettement plus importante pour le bloc communal (66% des recettes) que pour les départements (34%) et les régions.
Cette option de renforcement des ressources locales répondrait bien au critère de territorialisation, mais exigerait une péréquation horizontale plus importante entre collectivités.
S’agissant de la fiscalité nationale partagée, elle représente aujourd’hui environ 21% des recettes des collectivités, avec trois principaux impôts - la taxe sur la valeur ajoutée (TVA, pour 37,4 Md€), la taxe intérieure de consommation des produits énergétiques (TICPE, pour 11 Md€) et la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA, pour 8,2 Md€). Cette option répondrait bien aux critères d’équilibre et de solidarité, en revanche le critère de territorialisation implique une attention particulière à la définition concertée des règles et indicateurs de répartition pour tenir compte des caractéristiques socio-économiques des territoires. Enfin, les dotations et subventions représentent aujourd’hui 26% des ressources locales.
L’option d’un renforcement des dotations permettrait une sécurisation des recettes à un niveau adapté aux dépenses, mais ferait dépendre les collectivités territoriales des transferts financiers de l’État. Compte tenu des limites des options polaires, une réforme du financement des collectivités locales devrait viser à combiner les différentes ressources en conciliant les objectifs d’autonomie et de solidarité.
La Cour a ainsi élaboré un scénario possible de réforme qui recentrerait la fiscalité locale sur le bloc communal pour plus d’autonomie et de responsabilité, mettrait en place un système plus solidaire de financement des départements pour leur permettre de faire face à leurs dépenses sociales et renforcerait le financement des régions par la fiscalité nationale économique.
Les conditions d’une réforme
Aucune réforme profonde du système de financement des collectivités locales ne sera possible sans un climat de confiance avec l’État et une concertation fondée sur un partage et une appropriation plus forte des données. Cet impératif implique de mettre en place des instances adaptées, en créant une autorité indépendante, chargée d’organiser ce dialogue ou en réformant l’actuel Comité des finances locales. Ce dialogue plus équilibré exige des outils partagés et des données de qualité, facilement accessibles sur les recettes et les dépenses.
La Cour estime que deux impératifs devraient guider toute évolution du financement des collectivités locales : la simplification et l’équilibre financier.
Elle formule des recommandations pour accroître la lisibilité et la résilience du système de financement, clarifier les responsabilités sur les impôts locaux, simplifier le partage des impôts nationaux en tenant compte des réalités socio-économiques pour leur répartition entre collectivités.
COUR DES COMPTES >> Rapport du 12.10.2022